Est-il possible pendant que l’on vit, avec toute cette énergie, cette capacité et cette agitation, de mettre fin par exemple à l’attachement ? Car c’est ce qui va se passer quand vous allez mourir. Peut-être êtes-vous attachés à votre femme ou à votre mari, à vos biens. Peut-être êtes vous attachés à une croyance en Dieu, c’est-à-dire à une simple projection ou invention de la pensée, mais vous y êtes attaché parce que cela vous donne un certain sentiment de sécurité, aussi illusoire soit-il. La mort signifie la fin de cet attachement.
Maintenant que vous vivez, pouvez-vous volontairement, facilement, sans aucun effort, mettre fin à cette forme d’attachement ? Ce qui signifie mourir à quelque chose que vous avez connu - vous me suivez ?
Pouvez-vous le faire ? Car c’est mourir et vivre à la fois sans être séparé de la mort par une cinquantaine d’années, en attendant qu’une maladie vous achève. C’est vivre avec toute votre vitalité, votre énergie, vos aptitudes intellectuelles ainsi qu’une grande sensibilité et à la fois c’est aussi mourir, en finir avec certaines conclusions, certaines manies, expériences, attachements et blessures.
Cela implique de vivre avec la mort tout en vivant. La mort n’est pas alors quelque chose de lointain, la mort n’est pas quelque chose qui se trouve à la fin de la vie, résultant d’un accident, de la maladie ou de la vieillesse, mais elle est plutôt une fin à toutes les choses de la mémoire - c’est cela la mort, une mort qui n’est pas séparée de la vie.
Causeries d’Amsterdam - 20 sept 1981 - La nature de la pensée. P.168.