La faculté de penser est commune à toute l’humanité. La pensée, ce n’est pas ma pensée, mais la pensée. Elle n’est ni spécifiquement orientale ni occidentale, elle n’appartient pas plus à un camp qu’à un autre : La pensée est une.
Nous allons à présent expliquer ce qu’est la pensée, mais une explication n’est pas autre chose que la prise de conscience réelle de la manière dont la pensée naît en nous. L’orateur peut examiner en détail cette éclosion de la pensée, la décrire, mais cette explication ne saurait remplacer votre compréhension de l’origine de la pensée. Entendre une description, ce n’est pas faire soi-même la découverte, cependant l’explication, la communication verbale peuvent vous mettre sur le chemin de votre propre découverte. Et c’est beaucoup plus important que les explications de l’orateur.
... Qu’est que cette pensée dont vous dépendez - que ce soit pour gagner votre vie, dans vos relations, ou dans votre quête d’une dimension transcendante ? Comprendre la nature de la pensée est une chose très importante... La pensée est la réponse de la mémoire, la mémoire ayant stocké des souvenirs par el canal du savoir, savoir lui-même emmagasiné au travers de l’expérience. Autrement dire, il y a d’abord l’expérience, puis le savoir, puis la mémoire stockée dans le cerveau, puis la pensée, puis l’action : et cette action nous incite à apprendre toujours plus -on accumule de nouvelles expériences, de ne nouvelles connaissance, on stocke toujours plus de souvenirs dans le cerveau, puis on agit, et cette action est incitative, elle fait qu’on veut apprendre plus. L’ensemble de ce processus se fonde sur tout ce mouvement qui part de l’expérience, du savoir, de la mémoire, pour aboutir à la pensée puis à l’action.
Tel est le moule dans lequel nous vivons -celui de la pensée. c’est un fait indiscutable... c’est ce qu’a toujours fait l’homme et depuis tout ce temps il reste enfermé dans ce cycle sans fin du mouvement de la pensée. dans ce cadre étroitement limité, nous avons le choix... mais tout reste pourtant confiné à ce territoire limité du savoir. Nous fonctionnons donc toujours dans le cadre du connu ; et le savoir va toujours de pair avec l’ignorance, car le savoir absolu n’est dans aucun domaine. Nous sommes donc toujours dans cet état contradictoire où se côtoient savoir et ignorance. La pensée est incomplète, morcelée, et le savoir ne pouvant jamais être absolu, il en résulte que la pensée est limité et conditionnée. et elle nous crée une multitude de problèmes... Le savoir est nécessaire en un certain sens, et c’est pourtant ce qu’il y a en nous de plus dangereux. Comprenez-vous cela ? Nous ne cessons d’accumuler un immense savoir- à propos de l’univers, de la nature de toutes choses, dans le domaine scientifique etc. bref, nous ne cessons d’entasser une infinité de connaissance. Mais ce savoir peut nous empêcher d’agir dans la plénitude, dans la complétude de notre condition d’homme. C’est l’une des difficultés .
L’esprit et la pensée, poche, p. 186-188.