Accueil - Jiddu Krishnamurti et son enseignement. - Citations

La maturité dans sa forme la plus haute est la fin de l’intérêt person­nel. A partir de cette maturité jaillit un mode de vie naturel, facile, où le travail accompli en commun, la coopération, est une chose naturelle



Krishnamurti. — Travailler ensemble, faire ensemble différentes choses, construire, créer ensemble — ce n’est pas tant ce que vous créez, ceux avec qui vous travaillez, ni l’entourage quel qu’il soit — il s’agit de la qualité de cœur et d’esprit où règne ce sentiment de coopé­ration. Nous demandons toujours, n’est-il pas vrai, avec qui dois-je coo­pérer, à quel sujet ? Quand l’objet d’une activité est très clair — le but, l’idéal, le « ce qui devrait être » — alors ceux qui se sentent attirés font corps, forment une cellule avec laquelle ils coopèrent.

Donc, nous dési­rons que le but soit clair et aussi les gens qui sont attirés vers ce même but avec qui nous devons travailler, construire, et permettre à ce but de prendre corps. Ou bien encore nous coopérons avec d’autres autour d’un idéal ou d’un représentant de cet idéal, autour d’une autorité ou d’une structure verbale. En général, c’est ce qu’on entend par coopéra­tion, travail en commun, construction en commun. Et, en tout ceci, il y a un courant profond d’intérêt personnel dissimulé par l’activité au nom de la coopération, de l’Etat, de Dieu et ainsi de suite. Une telle activité qui dissimule un intérêt personnel entraîne la division. Verbalement nous travaillons ensemble mais d’avance il y a des groupes séparés. Chacun de ceux-ci a sa propre autorité qui nie toutes les autres ou celle d’un groupe dominant.

Or, peut-il y avoir un travail en commun s’il existe une forme quel­conque d’autorité ; celle de votre groupe à vous ou d’une personne particulière, ou l’autorité d’un idéal ou d’une croyance particulière ? L’autorité est la négation de la coopération, du travail fait en commun, du sentiment qu’on en a. Par conséquent, ce qui est important n’est pas le but, l’autorité, ni la personne ou le groupe avec lequel vous travaillez. Tout ceci conduit à des préférences et à des aversions ; toutes les for­mations de groupes comportent une division et, par conséquent, sont ennemies de la coopération ; toute activité qui divise — nationaliste, croyant et non-croyant — détruit la coopération. Le sentiment de coopé­ration est bien plus important que celui avec qui vous travaillez ou le but que vous poursuivez. Ce sentiment, cette inclination de travailler ensemble, voilà la chose essentielle.

Je regardais une fois un groupe de singes — assez nombreux — dirigé par le plus grand d’entre eux. Tous coopéraient avec lui, travail­laient avec lui. Il était le chef, le protecteur ; tous les dangers, il les connaissait. Il restait assis sur le sommet d’un arbre observant tout et sous sa protection les autres singes se sentaient en sûreté. Parfois quelques-uns se révoltaient et partaient ensemble, mais bientôt on pou­vait distinguer un nouveau chef parmi ceux qui avaient quitté le groupe. Ce phénomène, on peut l’observer non seulement parmi les animaux mais encore chez les hommes.

C’est avec la fin de l’intérêt personnel qu’apparaît l’aptitude à la coopération. Alors seulement, sans pour cela créer des groupes ou des divisions, on peut travailler avec d’autres, et on le fait. Seul, un tel homme sait quand il s’agit de ne pas coopérer, et ceci n’implique pas qu’il veuille former un autre groupe ou devenir une autorité. Quand on comprend réellement la nature de la coopération, les frottements et les divisions prendront fin d’eux-mêmes.

Questionneur. — Est-ce que vous entendez que je ne peux pas m’entourer de mes amis et des gens que j’aime bien ?

Krishnamurti. — Evidemment ce n’est pas cela. Vous aurez toujours vos amis, vos familiers, mais eux, à cause de votre préférence, arrêtent chez vous le désir de coopérer. Si vous voyez le danger qu’il y a à vous renfermer dans une famille, ou un groupe ou une croyance — religieuse ou autre — une qualité différente du mode de vie prend naissance.

Après tout, toute notre existence dépend de la coopération, mais cette existence devient hideuse quand l’intérêt personnel vient la souil­ler. La maturité dans sa forme la plus haute est la fin de l’intérêt person­nel. A partir de cette maturité jaillit un mode de vie naturel, facile, où le travail accompli en commun, la coopération, est une chose naturelle et non pas anormale.

Bulletin ACK n°08 - Automne 1970 - la coopération - Saanen



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