... mais dans ses relations à autrui, le désir du plaisir a été la cause de bien des problèmes, de désordres, de misère. Dans le monde des moines, les sannyasis ont cherché à le dépasser en s’efforçant de vénérer un idéal, une image, un symbole. Mais le désir, tel une flamme, est toujours brûlant.
Il s’agit de comprendre et d’examiner la nature du désir : sa complexité, ses activités, ses exigences, ses satisfactions ; ce désir toujours croissant de puissance, de situation, de prestige, et ce désir sans objet, celui qui dépasse les possibilités du quotidien et qui a poussé l’homme à tant d’actes laids et brutaux. Le désir est le produit de la sensation et est fait de toutes les images suscitées par la pensée. Il est source non seulement de mécontentement, mais aussi d’impuissance. Il ne doit jamais être réprimé, mais plutôt examiné dans sa nature, son origine et son objet.
Cet examen en profondeur ne répond pas à un nouveau désir, car il est sans motif. Il est semblable à l’observation d’une fleur sur laquelle on se penche pour la regarder : elle commence alors à se révéler dans la délicatesse de sa couleur, son parfum, ses pétales, sa tige et la terre dont elle vient. Regardons alors ce désir et sa nature, sans cette participation de la pensée qui associe toujours aux sensations le « plaisir », la « souffrance », la « récompense » ou la « punition ». Alors apparaît, sans explication verbale ni intellectuelle, toute la causalité qui est à la racine du désir. Sa perception subtile est elle-même l’intelligence, et, dans ses rapports avec le désir, cette intelligence réagira de façon saine et rationnelle.
J. Krishnamurti
Dernier Journal
Dimanche 24 avril 1983 (p.107-708)