L’adorateur est semblable à l’adoré. Adorer quelqu’un, c’est s’adorer soi-même ; l’image, le symbole, sont des projections de soi. Somme toute, votre idole, votre livre, votre prière ne sont que le reflet de votre éducation, ce sont vos propres créations même si quelqu’un d’autre les a inventées. Votre choix s’effectue en fonction de votre satisfaction, votre choix est votre préjugé. Votre image est votre ivresse, et elle est sculptée dans votre propre mémoire. C’est vous-même que vous adorez au travers de l’image que votre pensée a créée. Votre dévotion n’est que l’amour de vous-même recouvert du chant de votre esprit. Vous êtes le tableau, le tableau n’est que le reflet de votre esprit. Une telle dévotion est une forme de mensonge à soi-même qui ne mène qu’au chagrin et à l’isolement, c’est-à-dire la mort.
La recherche est-elle dévotion ? Rechercher quelque chose n’est pas chercher ; être en quête de la vérité n’est pas la trouver. La recherche nous permet d’échapper à ce que nous sommes. Nous essayons par tous les moyens d’échapper à ce que nous sommes. Nous sommes si insignifiants, fondamentalement nous ne sommes rien, et le fait de vénérer quelque chose de plus grand que nous est aussi insignifiant et vide que nous-mêmes. L’identification avec ce qui est grand est encore une projection de ce qui est petit. Le plus est une extension du moins. L’infiniment petit en quête de l’infiniment grand ne découvrira jamais que ce qu’il est capable de trouver. Les fuites sont nombreuses et variées, mais l’esprit qui fuit est peureux, étroit et ignorant.
Le fait de comprendre le processus de la fuite libère de ce qui est. Ce qui est ne peut être compris qu’à partir du moment où l’esprit n’est plus à la recherche d’une réponse. Chercher une réponse, c’est vouloir fuir ce qui est. Cette recherche revêt différents noms, dont l’un est la dévotion. Mais afin de comprendre ce qui est, l’esprit doit être silencieux.
J. Krishnamurti
Commentaires sur la vie Tome 2, Chapitre 10
La dévotion et le culte