"L’existence de la plupart d’entre nous est basée sur l’effort, sur une certaine forme de volition. Nous ne pouvons concevoir l’action qu’en tant que volonté tendue vers un but ; notre vie sociale, économique et notre vie soi-disant spirituelle sont une suite d’efforts lesquels culminent toujours en un certain résultat. Et nous pensons que cette application est nécessaire, essentielle. [...]
L’effort n’est-il pas une lutte en vue de changer ce qui « est » en ce qui n’est pas, ou ce qui devrait être ou devrait devenir ? En d’autres termes, nous luttons perpétuellement afin de ne pas nous trouver face à face avec ce qui « est » : nous cherchons à nous en évader ou à le modifier. Mais le vrai contentement est celui de l’homme qui comprend ce qui « est », et lui accorde sa véritable signification. [...]
Dès l’instant que j’accepte ce qui « est », il n’y a pas de faute. [...]
Il nous faut d’abord être libres pour voir que la joie et le bonheur ne se produisent pas par un effort. Y a-t-il création par exercice de la volonté, ou au contraire lorsque cesse l’effort ? C’est alors que l’on crée, n’est-ce pas, que l’on écrit, peint ou chante, lorsqu’on est complètement ouvert, lorsqu’on est intégré. C’est alors qu’il y a de la joie, que l’on s’exprime ou que l’on façonne un objet. Cet instant de création n’est pas le produit d’une lutte."
(Extrait de « La première et la dernière liberté », Krishnmurti, Le livre de Poche, 1994 (1954))