L’amour n’est pas la souffrance, il n’est pas non plus fait de jalousie, mais il est dangereux, car il détruit. Il détruit tout ce que l’homme a bâti autour de lui, sauf les briques. Il ne peut bâtir de temples, ni réformer la société corrompue ; il ne peut rien, mais sans lui rien ne se peut, quoi que l’on fasse.
Tout ordinateur, toute automatisation, peuvent changer la forme des choses, procurer à l’homme le loisir qui deviendra un nouveau problème, alors qu’il y en a déjà tant. L’amour n’a pas de problème, c’est pourquoi il est si destructeur et dangereux. La vie de l’homme est faite de problèmes, ces choses continues, sans solution ; sans eux, il ne saurait que faire ; il serait perdu et ne gagnerait rien à cette perte. Les problèmes se multiplient donc sans fin ; la solution de l’un donne naissance à un autre, mais la mort, bien sûr, est la destruction ; elle n’est pas l’amour. La mort est la vieillesse, la maladie, et les problèmes qu’aucun ordinateur ne peut résoudre.
Ce n’est pas cette destruction-là qu’apporte l’amour ; ce n’est pas cette mort-là qu’apporte l’amour. Elle est la cendre d’un feu préparé avec soin, le bruit des machines automatiques qui poursuivent leur travail sans interruption. L’amour, la mort, la création sont inséparables ; on ne peut choisir l’un et refuser les autres ; l’amour ne s’achète pas au marché ou dans une église ; ce sont là les derniers endroits où vous le trouveriez.
J. Krishnamurti - Carnets
12 janvier 1962 à Rajghat & Bénares (p.373-274)