Nous disions donc qu’il n’y a pas d’évolution psychologique. Le psychisme ne croîtra ni ne changera jamais en ce qu’il n’est pas. L’orgueil et l’arrogance ne peuvent ni s’améliorer ni s’accroître, pas plus que l’égoïsme, qui est le lot de tous les êtres humains, ne devient plus égoïste, plus proche de sa vraie nature. Il est assez effrayant de constater que le seul mot « espoir » comprend tout l’avenir du monde. L’idée d’un mouvement de « ce qui est » à « ce qui devrait être » est une illusion, et même un mensonge, si l’on peut se permettre d’employer ce mot. Nous acceptons comme fait accompli ce que l’homme répète depuis la nuit des temps. Mais si nous commençons à le remettre en question, à douter, nous pouvons voir très clairement - si nous voulons le voir, et non pas nous cacher derrière quelque image ou quelque formule sophistiquée - la nature et la structure du psychisme, de l’ego, et du moi. Le moi ne pourra jamais devenir meilleur. Il essaie, croyant le pouvoir, mais il demeure dans des formes subtiles. Le moi revêt bien des apparences et se cache dans bien des structures ; il peut varier d’un moment à l’autre, mais il reste toujours le moi, cette activité séparatrice et centrée sur soi, qui espère devenir un jour ce qu’elle n’est pas.
J. Krishnamurti
Dernier Journal
Jeudi 17 mars 1983 (p.47)